Maîtriser
Le pacte commissoire en droit OHADA et en droit Béninois
Pour une réalisation conventionnelle efficace et efficiente des sûretés
RÉSUMÉ PARTIEL
÷ L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a pris corps avec le Traité signé le 17 Octobre 1993 à Port-Louis (Ile Maurice), entre quatorze Etats africains membres de la Zone-franc auxquels se sont ajoutés, peu après, la Guinée Conakry, la Guinée Bissau et la République Démocratique du Congo. Ce traité a été révisé à Québec, au Canada, le 17 octobre 2008
Les banques ainsi que toutes les institutions dispensatrices de crédits savent que, s’il est toujours recommandé d’exiger de l’emprunteur une sûreté lors de la conclusion du contrat de prêt, le chemin se révèle malheureusement long entre la défaillance de celui-ci et la réalisation de ladite garantie.
Lors du forum justice-banque qui s’est tenu le 19 juillet 2017 à Ndjamena, le Gouverneur de la BEAC[1] a, par exemple, déclaré que « 90% des litiges dans le monde des affaires sont liés au recouvrement des créances. Les banques accordent des prêts et reçoivent en couverture des sûretés. Lorsqu’arrive un défaut, il y a des complications judiciaires qui limitent la possibilité pour ces établissements de crédit de réaliser ces garanties »[2].
Il s’est donc avéré nécessaire de réadapter l’Acte uniforme sur les Sûretés de 1997 aux exigences de célérité et d’efficacité économique[3] qui caractérisent la pratique des affaires[4]. Cette recherche de célérité ressort d’ailleurs du paragraphe 229 du Dispositif prudentiel applicable aux établissements de crédit et aux compagnies financières de l’Union Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) aux termes duquel « Le mécanisme juridique par lequel la sûreté est donnée ou transférée doit permettre de s’assurer que l’établissement bénéficiaire a le droit de la liquider ou de la conserver, dans les délais acceptables, en cas de défaut, d’insolvabilité ou de faillite… ».
La révision de l’Acte Uniforme relatif aux Sûretés intervenue le 15 décembre 2010 et entrée en vigueur le 15 mai 2011, a donc saisi l’occasion pour accentuer l’efficacité des sûretés en instituant, entre autres, le pacte commissoire.
÷ Définition du pacte commissoire
On peut retenir en termes prosaïque que le pacte commissoire est une clause qui indique que le créancier qui bénéficie d’une garantie mobilière ou immobilière pour le paiement de sa dette, deviendra propriétaire du bien donné en garantie en cas de non-paiement partiel ou total de sa créance, et ce, en dehors de toute procédure judiciaire.
L’institution du pacte commissoire vise donc à remédier à la lourdeur et à l’inefficacité des procédures judiciaires de réalisation des sûretés.
Il s’agit alors d’une modalité conventionnelle de réalisation extrajudiciaire des garanties. Et c’est là que réside tout son intérêt et toute sa vertu.
L’ouvrage s’est donné la vocation d’essayer de traiter dans les détails pratiques les questions qui restent sans réponse directe dans la loi et se rapportant à la notion du pacte commissoire. Il se veut en outre d’actualité en ce qu’il prend en compte, avec une note de commentaires et d’analyses, les dernières décisions rendues en 2022 par la Cour suprême communautaire du droit des affaires, Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA (CCJA).
÷ Intérêt pratique de l’ouvrage
Le problème de l’inefficience des procédures judiciaires de réalisation des sûretés n’est pas pour autant réglé avec le légalisation du pacte commissoire. Aussi, comme tout instrument juridique, le pacte commissoire ne peut être efficacement utilisé que s’il est maîtrisé, exactement comme dans tous les domaines de la vie où l’on emploie des outils.
Il suffit en outre de parcourir les conventions de prêt bancaire assorties de stipulations de pacte commissoire ou de « dation en paiement » pour se convaincre que, particulièrement, tout notaire, tout avocat de banque, tout juriste de banque ainsi que tout juge de tribunaux de commerce doivent lire cet ouvrage.
÷ Intérêt économique de l’ouvrage
Le pacte commissoire stipulé et mis en œuvre convenablement produit ce que les microéconomistes appellent l’économie des « coûts de transaction », en ce que cela a pour effet de minimiser les frais susceptibles d’être engendrés par sa stipulation irrégulière.
[1]– Banque des Etats de l’Afrique Centrale.
[2]– Cité par le Communiqué du Cabinet I.S.M CAMEROUN (spécialisé en formations en Assurance CIMA et en Droit OHADA), [en ligne], http:/ohada.com.
[3]– Sur la notion d’efficacité économique, cf. DUPICHOT (Philippe), L’efficience économique du droit des sûretés réelles, [en ligne], www.fondation-droitcontinental.org. Dans le Rapport accompagnant l’avant-projet de l’ordonnance française du 23 mars 2006 modifiant le droit français des sûretés, on pouvait lire : « Moderniser les sûretés afin de les rendre lisibles et efficaces tant pour les acteurs économiques que pour les citoyens tout en préservant l’équilibre des intérêts en présence, tels sont les objectifs de la présente ordonnance » ; cité par Ph. DUPICHOT, « L’efficience économique du droit des sûretés réelles », article préc.
[4]– Mais il faut indiquer que déjà, des voix se sont levées pour relever les insuffisances contenues dans le nouvel Acte Uniforme sur les Sûretés. A titre d’exemple, dans une thèse consacrée à la « Réflexion critique sur l’efficacité des sûretés réelles en droit OHADA », Mr Kouakou S. BOHOUSSOU a pu écrire que « les réformes d’envergure menées par le législateur OHADA n’ont toutefois pas suffi à éteindre tous les problèmes fondamentaux qui sapent l’efficacité globale du système des sûretés réelles, car elles furent par de nombreuse hésitations » L’auteur avance que, malgré la réforme de 2010, « le droit des sûretés réelles OHADA subit une crise de confiance qui découle de son insuffisance de clarté et de cohérence. Or, dit-il, cohérence, et clarté sont source de sécurité ; notion intimement liée à celle de sûreté » ( S. BOHOUSSOU, « Réflexion critique sur l’efficacité des sûretés réelles en droit OHADA : proposition en vue d’une réforme du droit OHADA des sûretés réelles », thèse préc., pp. 16 et 18).